Le château des anglais

Point sombre et inquiétant au milieu d'un paysage apaisant, ce château à la façade meurtrie semble toujours témoigner des heures sombres qu'il a connu.

On raconte qu'au moment de la construction de l'édifice, toute fin XIXème, les propriétaires ont fait abattre à deux fois les maçonneries pour apporter des retouches de dernières minutes aux façades extérieures. Avec son style mi-gothique mi-oriental, la demeure ne devait pas passer inaperçue dans la région. Plusieurs années après la fin des travaux, le fils unique de la famille qui vivait là se noiera son loin du domaine. Sa mère, déjà veuve de son premier mari, en perdit la raison et décédera après deux ans d'une terrible descente aux enfers mentale. Le second mari trouvant également la mort durant cette intervalle, le château, vacant, abritera finalement de nombreux malades de la tuberculose. Nul doute que cette période là devait aussi être lourde, ayant probablement marqué à jamais la mémoire de ce sinistre édifice. 

je m'aventurerais dans un intérieur plongé dans la pénombre et dans un profond silence, l'endroit étant resté en suspens depuis le départ des derniers malades il y a fort longtemps. La vie n'a jamais su reprendre possession de cette bâtisse qui paraissait chaque jour un peu plus triste, un peu plus froide. Dans le grand salon régnait une atmosphère envoûtante et mystérieuse avec ces balustrades bleues, ces grandes ouvertures obstruées et cette colossale cheminée ornée. Difficile d'imaginer l'endroit vivant et lumineux, comme ça devait être pourtant le cas il y a un peu plus d'un siècle. Assez inhabituel, le grand escalier de bois valait lui aussi le coup d'œil, le reste du château n'étant plus qu'une succession de salles vides et dégradées. Même la chapelle n'avait plus guère d'intérêt esthétique, celle-ci ayant été reconvertie de longue date en espace de stockage improvisé.

Relégué au rang de curiosité locale qui jure de plus en plus avec son environnement, l'étonnant château ne semble pas prêt à reprendre vie. Finir a-t-il un jour par retrouver un peu de gaieté, ou garedra-t-il à jamais cet aspect austère et désolé ?